Après la fin de la guerre contre les Covenants, la reconstruction a pu enfin commencer dans les différentes colonies, et en particulier sur la Terre, berceau de la race humaine. Si ce travail n'a rien de complaisant et de joyeux, il peut, cependant, en résulter parfois un étonnement certain, soit en retrouvant des survivants (comme ce fut le cas sur de nombreuses colonies considérées comme "mortes"), soit en retrouvant des souvenirs fugaces mais précieux. Et c'est exactement ce qui s'est passé.

Alors que les équipes de déblaiements s'occupaient des quelques quartiers Nord encore existant de New Mombasa, ils ont retrouvé de nombreuses affaires appartenant aux anciens résidents, mort pour la plupart. L'un de ces résidents n'étaient autre qu'Andrea Molina, célèbre poète, penseur et philosophe de notre époque. La plupart de son oeuvre, considérée comme la plus pertinante depuis Clindman et McKellen, représente un pan entier de la pensée moderne.

Si Andrea Molina reste encore introuvable, les fouilles de son appartement ont révélé un trésor inestimable : ses derniers écrits, allant du simple poème à des pensées philosophiques plus théoriques. La plupart, dans un mauvais état, devront subir un traîtement spécifique avant de pouvoir être lue du monde entier. Cependant, une perle a miraculeusement survécu à ce désastre, et d'après la date, il s'agirait de toute évidence de ses derniers mots couchés sur le papier.

Ce poème, intitulait Les Ailes Rouges de la Guerre, s'inspire de la vision apocalyptique de ces trente dernières années. Si celui-ci ne semble être qu'une ébauche, un premier jet, il retranscrit parfaitement ses sensations ressenties de désespoir et de chagrin. Arborant une écriture en alexandrin, typique de l'Antiquité, Andrea Molina semble vouloir se rapprocher de ces tragédies grecques où l'issue, héroïque mais irrémédiablement tragique, ne pouvait être évitée. Ecrit juste avant la fin de la guerre, il semble plus pessimiste que jamais : comment une telle guerre peut conduire à une fin heureuse, ou tout du moins aux apparences heureuses ?

C'est pourtant ce qui s'est passé.

Patricia Doherty, Directrice Générale du Musée Historique de New Mombasa, 16 Juillet 2553.

Les Ailes Rouges de la Guerre

Elles sont venues de par-delà les étoiles,

Les ailes rouges de cette guerre infernale.

Elles ont enflammé la multitude splendeur

Des paysages, incendiant les âmes de peur.

Lovés dans toutes les colonies et contrées,

Les blés mouvants de larmes ont été ravagés,

La mort héritant aux visages de la vie,

Balafrés des porteurs d'une rage asservie.

Les villes, tentaculaires et de métal, rasées

Dans les soirs au crépuscule rougit, damnés.

Les flammes hautes ont jonchées les parvis de pierre,

Les bords de route aux étendards de cimetierre.

Les vignes rosies de la muraille enchantée

Ont rejoint au vent les campagne' hallucinées

Dans le grondement des débâcles insensées.

Le temps a passé, les flambeaux noirs ont masqué

Les visages illusoires de la liberté,

Les apparus dans les chemins ensoleilés.

Les forces tumultueuses des guerriers en vie

Ont fini par s'épuiser, grisées et meurtries,

Dans les impensables heures, claires et épurées,

D'une victoire abstraite chèrement payée.

Andrea Molina, 18 février 2553